La chronique « Il/elle n’a jamais fait de slam » vise à faire connaître des poètes et leur poésie qui, bien qu’écrite pour le livre, peut susciter l’intérêt des amis du Slam. Puisque le blogue est d’abord et avant tout écrit (et non sonore, parlé ou vidéo), la publication de quelques poèmes s’avère appropriée.
Jacques Ouellet

À l’instar des autres poètes invités à la chronique « Il/Elle n’a jamais fait de slam », j’ai demandé à Jacques Ouellet de rédiger un court texte pour nous expliquer pourquoi il n’a jamais participé à un slam de poésie.
Je n’ai jamais fait de slam parce que :
La poésie peut aussi bien prendre la forme du slam sur une scène que la forme d’un silence sans commune mesure, vaste et contenu.
Explorer questionner douter traverser.
J’ai choisi entre les deux la voix du murmure. Cela m’est venu jeune par nécessité, par évidence alors qu’adolescent, j’ai une première fois entendu la parole du vent dans la cime d’un pin solitaire. Je l’entends toujours et cette expression me guide, je l’ai choisie, je la pratique.
Les voix se croisent nécessaires et multiples se font écho. Certaines me parlent et me font signe davantage que d’autres.
Je reste suspendu, impressionné par la performance des slameuses, slameurs.
J’emprunte un autre chemin.
Quelques poèmes
extraits de N’y allez pas
par Jacques Ouellet,
Éditions du Noroît, 2004

les vents sont ici des châteaux
tourelles d’air où s’achèvent
et recommencent tant de visages
usant leur cycle aussi sûrement
que la mer gruge le fer des parures
qui donc passe qu’on ne verra jamais
deux heures sonnent
la nuit ne sait toujours pas
l’invisible chemin à mesure
s’ébauche et disparaît
ce n’est pas fini on va
sans voir
l’herbe brûlée
l’affrontement de molécules
debout un peu penché
au bord de la lampe on attend
de la tête aux pieds
le vent de l’aube sur son corps vieillissant
on attend toujours
d’être ébloui
je t’offre à boire
tu as déjà bu
la lampe tempête
fouille ce que jamais nous ne fûmes
et si la lampe dérisoire allait
un tout petit instant
tenir tête au néant
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Poèmes extraits de N’y allez pas, Jacques Ouellet, Éditions du Noroît,
100 pages, 2004.
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