mercredi 23 janvier 2013

Il n'a jamais fait de slam

Une chronique de Geneviève Lévesque
d'après une idée originale de André Marceau

La chronique « Il/elle n’a jamais fait de slam » vise à faire connaître des poètes et leur poésie qui, bien qu’écrite pour le livre, peut susciter l’intérêt des amis du slam. Puisque le blogue est d’abord et avant tout écrit (et non sonore, parlé ou vidéo), la publication de quelques poèmes s’avère appropriée.

Michel Blouin

Michel Blouin est peintre et poète. Originaire de l’Île d’Orléans, il a publié deux livres aux Écrits des Hautes-Terres : J’écris ciel comme sang (2007) et Survivant de la pleine lune (1999). Ses poèmes ont paru dans des revues québécoise et française. Il a participé à de nombreux récitals de poésie ainsi qu’à des spectacles rock où ses textes sont mis en musique par le duo Rage Musette, dont il est le fondateur. Ses poèmes ont aussi été interprétés par les finissants du Conservatoire d’art dramatique de Québec, lors du récital Le chant vient du dedans (2001).

Lors du lancement de son deuxième livre, son éditeur, Pierre Bernier, a déclaré : « Michel Blouin a une écriture unique, une voix et un ton personnels et il ne fait jamais dans la dentelle. Sa poésie est celle de la lucidité, de la révolte, de l'impudeur, mais aussi d'une immense tendresse. » Son premier livre, Survivant de la pleine lune, a été qualifié de « véritable coup de poing » lors de sa sortie par le critique Laurent Laplante.

Dernier recueil publié : J’écris ciel comme sang, Écrits des Hautes-Terres, 2007, 95 pages. Couverture : tableau de l’artiste.

Pour plus d’information : www.michelblouin.com.

À l’instar des autres poètes invités à la chronique « Il/Elle n’a jamais fait de slam », Michel Blouin a rédigé un court texte pour nous expliquer pourquoi il n’a jamais participé à un slam de poésie.

Je n’ai jamais fait de slam parce que : 

Je n’ai jamais fait de slam parce que le temps charrie des pages et des feuilles qui ne demandent qu’à être colorées.

Je suis poursuivi par ce temps.

Mes mots, en vieillissant, se changent en couleurs.


Quelques poèmes extraits de Survivant de la pleine lune et de J’écris ciel comme sang 
par Michel Blouin 
Écrits des Hautes-Terres, 1999 et 2007


Paroles d’enfants

Quand je vais être grande
Je veux être un chien
Pour que mon père me touche
Que ma mère s’occupe de moi

Mon nom sera Peyotl

(Survivant de la pleine lune, p. 33)



Le clochard et le soleil

Prouve-moi que tu existes
prouve-moi que tu existes la nuit
que ce n’est pas vrai la lune
qu’on ne voit rien
que l’ombre est somnifère de riche
que des hommes mangent à leur faim
que je n’ai pas froid au pied
que la foi donne
prouve-moi que j’existe
que je ne suis pas seul au monde
que je n’ai pas peur
que si je crie il y aura écho
prouve-moi que je ne suis pas
la résignation
dans ma prière
de dormir au chaud sans crainte
que ma folie est lumière
je n’ai plus d’empreintes à mes mains
mon visage nulle part
sans photo sans ombre
je n’ai plus de soleil
la nuit je ne crois plus en Dieu
la nuit je fais des feux
à faire fondre le fer

(Survivant de la pleine lune, p. 70-71)



Il tombe des meurtres de mon visage. Des instants de paysage. Je vais, couronné de lierre, franchir ma vie. Hadès rôde. Me saigne. Je l’aime. À chacun de ses coups, je sombre en moi. J’aurais voulu l’entendre dire : « Viens! viens ici, l’Icare, tu t’es perdu. » Mais rien. Rien que le bruit du fer sur ma peau. Les gens qui passent.

(J’écris ciel comme sang, p. 69) 



Soleil
je te lève
ma peau

donne-moi
à boire
le lait sombre
des nègres lunes

(J’écris ciel comme sang, p. 52)


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Poèmes extraits de Survivant de la pleine lune, Écrits des Hautes-Terres, 1999 et de J’écris ciel comme sang, Écrits des Hautes-Terres, 2007.

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